Retour sur la promenade du samedi 19 novembre matin dans le quartier Centre historique – Duchesse
Pour cette seconde promenade, le rendez-vous donné aux promeneurs est à la Maison des Cultures et de la Cohésion Sociale de Molenbeek (MCCS), rue Mommaerts. Nous arrivons en même temps que de nombreux enfants qui viennent ici tous les samedis participer à des ateliers créatifs.
• Maison des Cultures et de la Cohésion Sociale de Molenbeek / dimension sociale
Notre groupe se rassemble au foyer, devant la salle de spectacle de la Maison des Cultures. Après une introduction aux promenades citoyennes par Julien Knoepfler, coordinateur de l’Agenda 21 communal, c’est Carla Fontes qui nous présente succinctement les missions et activités de la Maison des Cultures. L’accent est mis sur la dimension sociale et la volonté de la MCCS de donner accès à la culture à tous et en particulier aux habitants du quartier. Pour aller au-delà de la « consommation » de la culture au travers de la programmation de spectacles, la MCSS propose également de nombreuses autres activités, telles que les ateliers créatifs, dont le but premier est d’apprendre, par l’expérimentation, à se passionner pour des cultures autres que la sienne.
Herlinde Swinnen nous présente ensuite le travail fait par Vaartkapoen , acteur culturel et social important de la communauté néerlandophone, actif depuis 20 ans sur le terrain molenbeekois.. Les activités du Vaartkapoen sont nombreuses et diverses, et ont pour groupes-cibles prioritaires les femmes, les enfants, les personnes âgées et les nécessiteux, dans une approche intégrée fondée sur la culture, le bien-être et l’éducation tout à la fois. Dans le champ culturel, une salle de concerts alternatifs attire des personnes du quartier et de tout Bruxelles, qui cherchent à contribuer à donner une image positive de Molenbeek. Côté économie sociale et solidaire, Vaartkapoen a également mis sur pied plusieurs projets dont un atelier de couture ou encore un restaurant social.
Après ces deux présentations, la parole est donnée aux participants. L’un d’eux nous présente le GAS-Mol (groupement d’achat solidaire) qui regroupe des familles de Molenbeek. Elles viennent, une fois par quinzaine, chercher un panier de légumes livré par un maraîcher bio de la région soit à la Maison des Cultures soit au Jardin Urbain de la rue Fin. Même si ce membre du GAS avoue que ce genre de groupe est le plus majoritairement fréquenté par des personnes gravitant dans les mêmes cercles, il relève l’intérêt que cette distribution se passe dans ce lieu de culture, ouvert à tous. Et pour mélanger les « cultures » (celle de légumes et celle avec un grand « C » !), un cours de cuisine autour des légumes « oubliés » à même été organisé à la MCCS !
Une autre prise de parole intéressante, celle d’une « ex-molenbeekoise » qui a été élève en secondaire il y a plus de 30 ans dans ce même lieu, alors qu’il avait encore la fonction de lycée (pour mémoire, Maison des Cultures s’est installée dans la place il y a 5 ans). Elle n’y avait pas remis les pieds depuis et avoue être agréablement surprise par sa transformation ! Elle relève l’importance d’avoir, dans des quartiers comme celui dans lequel nous sommes – et qui ne bénéficient pas toujours d’une bonne image – de telles initiatives, qui apportent au quartier un vrai « rayon de soleil ».
• Maison de quartier Bonnevie – Parc Bonnevie – Axe mobilité douce / Dimension territoire et mobilité
Notre groupe se met ensuite en route dans les petites rues alentour pour rejoindre le Parc Bonnevie, où nous sommes accueillis par l’ASBL « Bonnevie ». Gwendoline, de l’association, nous rappelle les missions et actions de la Maison de quartier, entre autres dans le champ du logement et de l’habitat. Puis elle nous présente plus spécifiquement le travail fait avec les habitants du quartier autour du réaménagement du parc dans lequel nous nous trouvons.
Après un premier aménagement dans les années 90 conçu avec la participation de groupes de jeunes, de familles et de la Maison de quartier, la plaine de jeux vient d’être totalement réaménagée en 2010 dans le cadre d’un contrat de quartier. Autour de ce réaménagement, un important processus de participation, notamment animé par « Bonnevie », a été mis en place. Il a permis aux habitants, enfants, familles d’exprimer leurs envies, leurs besoins vis à vis de cet espace de loisirs et de rencontre et de prendre part à sa conception. La multitude de besoins exprimés dépassant le périmètre de la plaine de jeux, une dynamique de projet a été incluse dans le contrat de quartier allant au-delà du parc et donnant naissance à un projet d’axe de mobilité douce pour les piétons et vélos.
Une intervention d’un des participants relève qu’une suggestion des habitants avait été de construire des abris extérieurs à vélo, pour les familles n’ayant pas de possibilité de stocker leur vélo dans leur immeuble. Le débat est ouvert sur le stationnement, couvert ou non des vélos, qui nécessite bien évidemment d’être facilité si l’on veut promouvoir l’usage de ce mode de déplacement.
Nous traversons ensuite le parc pour emprunter le futur axe de mobilité douce. Le projet est détaillé par Gwendoline, mais aussi par Caroline, représentant l’association « Jeunes et rue ». L’association a soutenu un processus de participation des jeunes du quartier se trouvant souvent dans une situation fragile pour qu’ils puissent exprimer leurs besoins et s’intégrer dans ce processus de réaménagement de l’espace public. La disparition d’anciens lieux de rencontre abrités du fait des nouveaux aménagements pose la question de la convivialité et des lieux d’échange pour les plus grands. Une fois encore, revient le sujet de la place que l’on donne ou que peuvent prendre les adolescents et les jeunes adultes dans la cité, sujet que nous avions déjà abordé en aparté lors de la promenade dans le quartier maritime.
Le projet de réaménagement de la place communale est également abordé. Après des phases d’expérimentations au cours desquelles la place a été vidée de toute voiture, le projet est actuellement en cours de développement.
Nous empruntons ensuite pendant un instant la voie piétons / vélo aménagée le long du canal et particulièrement agréable ! Entre promeneurs, nous nous faisons la réflexion que si tout Bruxelles était aménagé de la sorte (et aussi plat !), nous serions sans doute plus nombreux à circuler tous les jours à vélo ! Puis notre chemin nous amène à passer devant le restaurant social « Les uns et les autres », visité lors de nos journées de repérage et dont nous présentons rapidement les projets et le fonctionnement. Nous évoquons également le réaménagement temporaire de la friche au coin de la chaussée de Gand et de la rue du comte de Flandre, avec des pots de fleurs géants, et des bancs colorés destinés à la pause et à la rencontre.
• Jardin Urbain de la rue Fin – association La Rue / dimension environnement
Notre chemin nous mène ensuite au Jardin Urbain de la rue Fin où nous sommes accueillis par l’association « La Rue ». Là, c’est Christian qui nous retrace l’histoire du lieu, du combat qui a permis de faire de ce centre d’îlot un jardin partagé ouvert à tous. 10 ans d’activité associative et militante ont permis de créer un lieu dans lequel s’investissent de façon collective des gens du quartier, qui est ouvert à tous durant des permanences hebdomadaires, et dans lequel des enfants viennent aussi en groupe apprendre et expérimenter ce qu’est une plante, un milieu naturel, etc. On trouve également ici un compost collectif. Une portion de nature urbaine, contenue entre ces murs de béton et qui de l’état de friche est passée à celle d’un lieu vert, convivial et ressourçant.
Lors du débat qui suit cette présentation l’une d’entre nous pose la question de la place de la nature dans la ville, d’une nature plus sauvage, de type « terrain d’aventure ». Christian de l’association « La Rue » insiste sur le compromis qui a été fait pour privilégier la dimension pédagogique du projet qui, s’il n’est pas un lieu « d’aventure », est avant tout un lieu d’observation.
Nous continuons dans la rue Fin pour nous arrêter devant un ensemble de logements sociaux qui ont été construits selon les principes de l’architecture passive. Fadel, heureux habitant et propriétaire d’un de ces logements et président de l’association L’Espoir nous raconte très succinctement le parcours de ces 14 familles qui pendant 5 années ont construit ensemble ce projet exemplaire, aujourd’hui concrétisé. « 14 familles sous un seul toit », donc, qui entendent donner un souffle à ce quartier et ont dans leurs nouveaux projets d’aménager un jardin potager partagé dans la bande de terrain restant entre l’immeuble attenant et leurs logements, pour créer ici « une oasis de verdure » !
Sur le chemin de notre dernière étape, nous discutons avec Fadel qui nous en dit plus sur le fonctionnement du bâtiment. Il nous décrit le confort de leur appartement, même en hiver, bien qu’il n’y ait pas à proprement parler de système de chauffage. Grace à une isolation très performante et à un système sophistiqué de ventilation, sa famille apprécie d’avoir, même dans les périodes les plus froides, 21°C dans les chambres et au moins 18° en rez-de-chaussée, et ce tout en réalisant une belle économie tous les mois !
• Ancienne Brasserie Belle-Vue, futur hôtel et centre de formation / dimension économique
Au titre de dernière étape de notre projet, nous nous dirigeons à présent vers l’ancienne brasserie Bellevue, appelée à devenir un centre de formation aux métiers de l’hôtellerie et de la restauration, ainsi qu’un hôtel « d’apprentissage ». Le projet est développé dans le cadre d’un contrat de quartier et inclut également une réflexion architecturale sur l’aménagement de ce site « entre deux eaux », entre le canal et la Petite Seine, souterraine. L’une des participantes de la promenade nous fait également part du travail de deux associations qui sont déjà présentes dans les locaux et font partie du projet : « Art2work » et « Platform Kanal », qui ont pour but de faire vivre cette partie de la Commune, à la fois tellement proche du centre de Bruxelles et pourtant séparée de celui-ci par diverses fractures topographiques et symboliques.
En marge de cette future offre hôtelière, nous prolongeons le débat sur la question du tourisme à Molenbeek . Y’a-t-il un potentiel ? Qu’est-ce qui pourrait être fait ? Il faudrait identifier un vrai marché pour une clientèle en marge du tourisme « classique » et avoir une offre qui soit réaliste, ouverte sur l’échange des cultures. L’enjeu pourrait être important et contribuer à donner une autre image de la commune.
Nous finissons notre promenade par une discussion ouverte. Le débat commence sur l’importance et la manière de présenter et d’échanger avec la population sur la multitude de projets en émergence dans la commune et sur le fait qu’une promenade telle que celle organisée dans le cadre de l’Agenda 21 ne peut être qu’une étape dans un tel processus. Les membres des différentes associations présentes nous font part de leur point de vue sur le travail de mobilisation et de sensibilisation qui doit être fait, qui doit s’inscrire dans le temps, s’adresser à un public encore plus large que celui présent ce jour, en utilisant un langage simple et adapté, dans un discours construit suivant une argumentation précise et qui permette aux habitants de comprendre les projets, de les accepter et d’y adhérer. « Il faut du temps, le temps d’assimilation est aussi important que le moment où l’on présente des choses. » L’échange se poursuit sur la façon dont les uns et les autres attirent l’attention des habitants, dont ils organisent ensemble des événements qui génèrent l’échange, le dialogue, etc. et qui amorcent l’acceptation du changement.
Fadel nous fait part également de son expérience d’animateur énergie. Suite à une formation auprès de l’IBGE, ils sont 2 personnes de l’association Espoir à animer auprès d’un large public (associations, classes, maisons médicales, CPAS, etc.) des ateliers énergie au cours desquels ils expliquent la façon de réaliser des économies d’énergie. Une expérience riche qui au cours des mois a touché et continue de toucher un grand nombre de molenbenkois. Les sujets abordés sont ceux de la vie quotidienne, on parle des gestes courants et ce message d’un habitant vers d’autres habitants semble réellement porter ses fruits.
Une personne de la commune de l’équipe « quartier propre » en charge du maintien de la propreté nous fait également part de l’évolution des comportements des habitants de Molenbeek face aux dépôts sauvages d’encombrants, au tri des déchets, etc. Par une action quotidienne dans les rues, des interventions dans les écoles, les associations, etc. dans un langage simplifié, accessible, la population semble de plus en plus sensibilisée et le résultat se fait sentir.